Le fil fait partie de ma vie, il est inscrit au plus profond de mon être, il m’est aussi précieux qu’un crayon. Et sur les pages vierges que m’offrent les tissus, je viens déposer mon écriture, une écriture nourrie de petits morceaux de souvenirs recueillis au creux de mon âme, je leur confie cette broderie qui mènera alors sa propre vie.
J’ai la certitude que mes gestes, répétés de façon incessante, sont inscrits dans une mémoire ancestrale, que la manière instinctive dont ma main s’exécute provient de ma lignée, de mes ancêtres tailleurs d’habits et brodeurs et qu’ainsi, j’établis une reliance entre présent et passé.
De ces œuvres textiles qui deviennent volumes, j’en observe les ombres portées. Je les saisis, traces fugaces d’un moment précis. Et le fusain, le crayon ou la mine de plomb prennent alors le relais de l’aiguille. La ligne dessinée s’étend, serpente. La main devient l’alliée de la ligne, et ouvre une nouvelle dimension sur le papier.
La pupille doit alors s’ouvrir grand pour suivre la main, suivre cet éternel va et vient, cet oscillement... une vibration, une existence à part entière.
Circé dans l’Odyssée d’Homère. Circé y est décrite comme une magicienne dotée de pouvoirs fabuleux. Vivant exhilée sur l’île d’Aéa et ne souhaitant plus croiser un seul humain, elle métamorphose ceux qui ont l’audace de pénétrer sur son territoire. Ainsi, lorsqu’Ulysse et son équipage accostent sur le rivage d’Aéa, elle transforme presque tout l’équipage en pourceaux. Ulysse échappera à cet envoûtement et restera une année auprès de Circé.
subtile et envoûtante, avec cette grande connaissance de l’art de la pharmaka. Elle maîtrise parfaitement les pouvoirs de toutes ces plantes magiques et ne néglige ni leur culture, ni leur récolte. L’acte même de la cueillette exige des rituels précis où rien n’est laissé au hasard.
Et si elle apparaît au tout début comme un obstacle lors du retour d’Ulysse en Ithaque, elle lui permet cependant d’accepter sa place en tant que simple mortel. Il restera auprès d’elle toute une année. Généreuse, Circé aidera Ulysse à reprendre sa route après qu’il a séjourné un an auprès d’elle.
c’est souvent faire appel à un imaginaire collectif où bouillonnent les élixirs et où des vapeurs souffrées s’échappent de fioles en verre, où druides et autres pythies marmonnent des incantations. J’ai décidé d’en prendre le contre-pied et de redonner ses lettres de noblesse à cette grande herboriste.
au travers des allées d’un jardin de Circé revisité en parcourant cette installation textile.
De l’Herbe aux anges, en passant par le Molly, le Gui ou la Belladone, j’ai volontairement brouillé les cartes. Certains pouvoirs sont effectifs, d’autres... pure invention. Et si quelques plantes hallucinogènes sont rangées dans les officines des pharmaciens, d’autres,
comme le Pavot ou la Mandragore ont rejoint la clandestinité.
Dans cette installation, j’ai choisi de mettre en scène les fleurs, suspendues au bout de fil de soie, sortant du cadre convenu, dans une fragilité qui masque la puissance de leurs pouvoirs.
j’en saisis la trace et naissent des dessins épurés. J’ai préféré l’aiguille comme crayon et l’organdi comme feuille, recréant ainsi un herbier imaginaire.
Ces esquisses viennent également nourrir mon travail de graveuse, dans un réel souci de cohérence plastique.
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